Proposé par Institut national de l’audiovisuel
Date de diffusion : 07 janv. 2021 | Date d'évènement : 06 janv. 2021
Le 6 janvier 2021, des émeutiers pro-Trump prennent d'assaut le Capitole de Washington, interrompant le vote de certification au Congrès de l'élection de Joe Biden à la présidence des États-Unis. Sur place, dans le chahut de l'émeute, Loïc de La Mornais, correspondant de France 2 à Washington, évoque des instants inimaginables et donne la parole à deux émeutiers. Son reportage est illustré par des images d'origine amateur de l'assaut du Capitole.
Contexte historique
Par Nicolas Lepoutre (Professeur agrégé d'histoire au lycée Guy de Maupassant de Colombes)
L’élection présidentielle états-unienne de novembre 2020 voit s’affronter le démocrate Joe Biden (sur un ticket comprenant Kamala Harris) et le républicain Donald Trump (avec Mike Pence), candidat à un second mandat. Avant même le jour du vote, le président sortant dénonce préventivement des fraudes auxquelles les démocrates seraient susceptibles de recourir (notamment via le vote par correspondance ou le vote anticipé) et qui pourraient seules expliquer son éventuelle défaite. Lorsque le dépouillement des suffrages, début novembre, place Joe Biden en tête, Donald Trump tente d’abord de faire pression sur des responsables électoraux locaux (par exemple en Géorgie), puis conteste les résultats. L’intégralité des recours déposés par le camp Trump est toutefois rejetée par les tribunaux.
Après chaque élection, les membres du Congrès se réunissent pour certifier les résultats de l’élection présidentielle ; il s’agit habituellement d’une procédure purement formelle. En janvier 2021, Donald Trump tente toutefois de faire pression sur Mike Pence, président du Sénat en charge de la certification, pour qu’il invalide l’élection de Joe Biden. Bien qu’il soit proche de Donald Trump, Mike Pence ne cède pas. En parallèle, une foule de partisans de Donald Trump (notamment des membres de milices d’extrême droite) s’est réunie à Washington : à l’issue d’un discours du président sortant, une partie d’entre eux pénètre dans le Capitole (où siège le Congrès) le 6 janvier dans l’après-midi et interrompt par la force le processus de certification. La police parvient à reprendre le contrôle des lieux après plusieurs heures. L’élection de Joe Biden est finalement confirmée.
En juillet 2021, la Chambre des représentants crée une commission d’enquête bipartisane (avec une petite minorité d’élus républicains) sur les événements du 6 janvier. Rendu le 21 décembre 2022, son rapport appelle à des poursuites judiciaires contre Donald Trump sur la base de quatre chefs d’accusation, dont incitation à une insurrection.
C'est désormais au ministère de la Justice de décider du sort de Donald Trump.
Éclairage média
Cet extrait met en exergue la dimension inédite de l’assaut du Capitole et son importance politique. Le siège du Congrès est ainsi qualifié de bâtiment sacré pour des générations d’Américains et de temple de la démocratie : dès lors, sa violente attaque (il est littéralement pris d’assaut) ne peut être considérée que comme un coup de force insurrectionnel qui fait vacille[r] la démocratie américaine. L’événement provoque manifestement un effet de sidération aux États-Unis, mais aussi en France, à en croire le vocabulaire employé par les journalistes (folle journée, du jamais-vu, etc.). Les images des forces de police débordées, de la panique dans l’hémicycle ou des bureaux saccagés renforcent encore l’impression de chaos, d’autant plus que sont notamment diffusées des images de mauvaise qualité prises par des smartphones dont le cadre vacille. Un important contraste apparaît avec les militants trumpistes, à qui la parole est largement donnée et qui semblent quant à eux calmes et parfaitement convaincus de leur bon droit.
La responsabilité directe du président sortant dans les événements du 6 janvier est explicitement mise en avant par le montage et la voix off. En effet, le reportage commence par des extraits du discours de Donald Trump qui appelle à marcher jusqu’au Capitole et à reprendre [le] pays par […] la force. Les expressions utilisées par les journalistes (consigne, message reçu) suggèrent que le dirigeant républicain possède une véritable emprise sur ses militants qui sont qualifiés d’adorateurs, c’est-à-dire de personnes dépourvues de tout esprit critique. Donald Trump est également blâmé pour sa réticence à faire cesser cette attaque contre la démocratie états-unienne : son discours appelant à se retirer pacifiquement du Capitole n’est prononcé que du bout des lèvres et après diverses pressions ; l’ordre n’est d’ailleurs rétabli qu’après l’envoi d’importants renforts policiers.